Son père range son violon dans un bel étui au fond d’un placard de la chambre conjugale. Presque chaque jour, il sort l’instrument et quelques partitions, puis va s’installer au salon. Il pratique plus ou moins longtemps et, parfois, ses fils ont le droit de venir l’écouter s’ils le désirent. Mais parfois il les met dehors et s’enferme. Lorsqu’il accorde son violon et que, comme il dit, il chauffe un peu les cordes, c’est la cacophonie ; les enfants se bouchent les oreilles. Souvent, l’instrument est d’une légèreté joueuse entre ses mains, les cordes dansent et vibrent sur une cadence rapide, emplissant la maison de notes claires et rieuses. À d’autres moments, il n’arrache à ces cordes que son désir sombre et douloureux de trouver le courage et la force de vivre.