7 mars 2008

Arthur Rimbaud : "A la musique" : pas de printemps pour les poètes #3


A LA MUSIQUE

Place de la Gare, à Charleville.


Sur la place taillée en mesquines pelouses,
Square où tout est correct, les arbres et les fleurs,
Tous les bourgeois poussifs qu'étranglent les chaleurs
Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses.

− L'orchestre militaire, au milieu du jardin,
Balance ses schakos dans la Valse des fifres :
− Autour, aux premiers rangs, parade le gandin ;
Le notaire pend à ses breloques à chiffres.

Des rentiers à lorgnons soulignent tous les couacs :
Les gros bureaux bouffis traînent leurs grosses dames
Auprès desquelles vont, officieux cornacs,
Celles dont les volants ont des airs de réclames ;

Sur les bancs verts, des clubs d'épiciers retraités
Qui tisonnent le sable avec leur canne à pomme,
Fort sérieusement discutent les traités,
Puis prisent en argent, et reprennent : "En somme !..."

Épatant sur son banc les rondeurs de ses reins,
Un bourgeois à boutons clairs, bedaine flamande,
Savoure son onnaing d'où le tabac par brins
Déborde − vous savez, c'est de la contrebande ; −

Le long des gazons verts ricanent les voyous ;
Et, rendus amoureux par le chant des trombones,
Très naïfs, et fumant des roses, les pioupious
Caressent les bébés pour enjôler les bonnes...

− Moi, je suis, débraillé comme un étudiant,
Sous les marronniers verts les alertes fillettes :
Elles le savent bien ; et tournent en riant,
Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes.

Je ne dis pas un mot : je regarde toujours
La chair de leurs cous blancs brodés de mèches folles :
Je suis, sous le corsage et les frêles atours,
Le dos divin après la courbe des épaules.

J'ai bientôt déniché la bottine, le bas...
− Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres.
Elles me trouvent drôle et se parlent tout bas...
− Et mes désirs brutaux s'accrochent à leurs lèvres...

Arthur Rimbaud, Poésies (vers 1870)


"A la musique" chanté et mis en musique par Kirjuhel

free music


source : Arthur Rimbaud : Poètes & chansons (par Chris Papin, Catherine Le Forestier, Patrick Janvier, ... [et al.], EMP, 2004 (CD en commande)

Quelques analyses du texte en ligne : berlol.net, abardel.free.fr, membres.lycos.fr/frcais/Rialm

6 mars 2008

Ludwig van Beethoven : Die Geschöpfe des Prometheus : ouverture

Frankenstein (1931), un film de James Whale, avec Boris Karloff

Les Créatures de Prométhée, Op. 43 : ouverture
Les Créatures de Prométhée a été composé entre 1800 et 1801, il s'agit d'un ballet commandé par le chorégraphe italien Salvatore Viganò. Le ballet sera créé à Vienne le 28 mars 1801. De l'oeuvre initiale constituée d'une introduction et de 16 numéros, seule l'ouverture est aujourd'hui donnée en concert.
L'argument du ballet :
"Prométhée, fuyant la colère divine sous forme d'orage, rejoint deux statues d'argile qu'il a modelées et leur donne vie. Mais ses créatures semblent privées d'intelligence et refusent de lui obéir, si bien que, de dépit, il songe un instant à les détruire. Au matin, il a l'idée de leur montrer des fruits et des fleurs ; sensibles à cette beauté naturelle, les créatures acceptent enfin de suivre Prométhée jusqu'au Parnasse où il demande à Apollon de leur instruire et de leur accorder raison et sentiments. Apollon invite alors Euterpe et Amphion (ou Orphée, selon les sources) à jouer. Au son de la harpe, les créatures s'éveillent à la sensibilité et se découvrent homme et femme. Une marche militaire annonce la venue de Mars qui les initie à la danses de boucliers. Mais il est suivi de la mort sous les traits de Melpomène, déesse de la tragédie, qui leur révèle leur destinée de mortels et tue Prométhée pour le punir de les avoir condamnés à une si terrible fatalité. La nuit tombe, les créatures implorent l'aide des dieux. Melpomène disparaît et, sur un geste de Thalie, muse de la comédie et des fêtes, un couple vient relever Prométhée qui prend place parmi les dieux. Les deux créatures s'avouent leur amour, un cortège nuptial se forme, Pan et Bacchus entraînent tout le monde dans une danse joyeuse et chacun loue Prométhée et rend grâce aux Dieux. " (source : lvbeethoven.com)

Prométhée, héros romantique
Un titan, Prométhée (dont le nom signifie « prévoyant »), pour rendre les humains supérieurs aux animaux, les rend capables de marcher debout. Puis il va dérober aux dieux le feu, caché dans un bâton creux. Pour le punir, Zeus le fait enchaîner au sommet du mont Caucase, où un aigle lui dévore chaque jour le foie, ce dernier se reformant sans cesse dans un cycle sans fin. Prométhée sera finalement délivré par Héraclès qui tuera l'aigle.

La figure de Prométhée pose le rapport de la nature régie par Dieu et de la civilisation développée par l’homme, mais aussi l'antagonisme de l’audace et du respect de l'ordre établi dans le contexte d'une l'Europe spectatrice de la Révolution française. (1799 voit l'arrivée de Napoléon Bonaparte au pouvoir)
"Les lectures du mythe de Prométhée s'articulent principalement autour de deux pôles. Le premier présente Prométhée comme un démiurge « maître du feu » et le second le présente comme un apprenti sorcier qui « joue avec le feu »". (fabula.org)
Prométhée est l’aventurier créateur d’une humanité nouvelle, celui qui conduit la civilisation, qui l'éclaire, en porteur de la philosophie des Lumières. C'est aussi l’insurgé vaincu, torturé par le dieu qui le retient captif. C'est celui qui par sa seule connaissance égale la toute-puissance du dieu (Zeus) et arrache aux Dieux (Vulcain, Mercure) une liberté nouvelle acquise avec lascience et la technologie.

En 1818, Mary Shelley écrit Frankenstein ou le Prométhée moderne (en français, en anglais)

La figure de Prométhée inspire également les philosophes socialistes du milieu du XIXe siècle : «La philosophie fait sienne la profession de foi de Prométhée: En un mot, j’ai de la haine pour tous les dieux! Et, cette devise, elle l’oppose à tous les dieux du ciel et de la terre, qui ne reconnaissent pas la conscience humaine comme la divinité suprême... Dans le calendrier philosophique, Prométhée occupe le premier rang parmi les saints et les martyrs». Karl Marx, Démocrite et Epirure (1841)

Pour en savoir plus sur l'oeuvre de Beethoven :
Les Ouvertures de Beethoven : Ouverture des Créatures de Prométhée op.43 par Laurent Marty (resmusica.com)
L'ouverture des Créatures de Prométhée par Laurent Marty (lvbeethoven.com)

Ludwig van Beethoven : "The creatures of Prometheus : overture" par le Vanderbilt Orchestra, dirigé par Matthew Quick (mars 2007)


CD disponible à la médiathèque de Dole : Beethoven : Overtures (Deutsche Kammerphilharmonie, Daniel Harding), Virgin Classics, 1999

Henri Michaux : "Plume au restaurant" : pas de printemps pour les poètes #2

Plume au restaurant

Plume déjeunait au restaurant, quand le maître d’hôtel s’approcha, le regarda sévèrement et lui dit d’une voix basse et mystérieuse : « Ce que vous avez là dans votre assiette ne figure pas sur la carte. »
Plume s’excusa aussitôt.
- Voilà, dit-il, étant pressé, je n’ai pas pris la peine de consulter la carte. J’ai demandé à tout hasard une côtelette, pensant que peut-être il y en avait, ou que sinon on en trouverait aisément dans le voisinage, mais prêt à demander autre chose si les côtelettes faisaient défaut. Le garçon sans se montrer particulièrement étonné, s’éloigna et me l’apporta peu après et voilà…
Naturellement, je la paierai le prix qu’il faudra. C’est un beau morceau, je ne le nie pas. Si j’avais su, j’auras volontiers choisi une autre viande ou simplement un œuf, de toute façon maintenant je n’ai plus très faim. Je vais vous réglé immédiatement.
Cependant, le maître d’hôtel ne bouge pas. Plume se trouve atrocement gêné. Après quelque temps relevant les yeux… hum ! C’est maintenant le chef de l’établissement qui se trouve devant lui.
Plume s’excusa aussitôt.

[…]
Henri Michaux, Un certain Plume (Gallimard, 1930)

Il y a dans le personnage de Plume, une légèreté, bien sûr, mais aussi un fatalisme, un "aquoibonisme" qui le rapproche de deux autres figures majeures du début du XXe siècle, Charlot, d'abord, le petit vagabond (the little tramp), mais aussi K., le héros accablé du Procès (1925) de Franz Kafka. Comme des leçons d'accommodement à la pesanteur et à la violence sociale dans une époque en prise avec la montée du totalitarisme.
Plume au restaurant est un texte court (4 pages) a fait l'objet de plusieurs adaptations par des élèves d'arts appliqués.

Plume au restaurant : une animation réalisée par trois élèves en 1° arts appliqués du lycée de Vence.


Plume au restaurant : court metrage réalisé dans le cadre des cours d'Art appliqué


Plume au restaurant

Charles Baudelaire : "Les Métamorphoses du vampire" : pas de printemps pour les poètes #1

F.F. Coppola "Dracula" (1992), d'après Bram Stoker (K. Reeves, M. Belluci, [et. al.]

Les Métamorphoses du vampire

La femme cependant, de sa bouche de fraise,
En se tordant ainsi qu'un serpent sur la braise,
Et pétrissant ses seins sur le fer de son busc,
Laissait couler ces mots tout imprégnés de musc :
"Moi, j'ai la lèvre humide, et je sais la science
De perdre au fond d'un lit l'antique conscience.
Je sèche tous les pleurs sur mes seins triomphants,
Et fais rire les vieux du rire des enfants.
Je remplace, pour qui me voit nue et sans voiles,
La lune, le soleil, le ciel et les étoiles !
Je suis, mon cher savant, si docte aux Voluptés,
Lorsque j'étouffe un homme en mes bras redoutés,
Ou lorsque j'abandonne aux morsures mon buste,
Timide et libertine, et fragile et robuste,
Que sur ces matelas qui se pâment d'émoi,
Les anges impuissants se damneraient pour moi !"

Quand elle eut de mes os sucé toute la moelle,
Et que languissamment je me tournai vers elle
Pour lui rendre un baiser d'amour, je ne vis plus
Qu'une outre aux flancs gluants, toute pleine de pus !
Je fermai les deux yeux, dans ma froide épouvante,
Et quand je les rouvris à la clarté vivante,
A mes côtés, au lieu du mannequin puissant
Qui semblait avoir fait provision de sang,
Tremblaient confusément des débris de squelette,
Qui d'eux-mêmes rendaient le cri d'une girouette
Ou d'une enseigne, au bout d'une tringle de fer,
Que balance le vent pendant les nuits d'hiver.


Ce texte fait partie des pièces condamnées et censurées pour "offense à la morale publique, ... la morale religieuse et aux bonnes mœurs" lors du procès des Fleurs du Mal en 1857, six mois après un procès qui conviait Gustave Flaubert devant un tribunal pour répondre de son roman Madame Bovary.

Léo Ferré présente et interprète "Les métamorphoses du vampire" (1986)

5 mars 2008

La playlist de mars

En attendant... les nouveautés


Arctic Monkeys : Favourite worst nightmare, Domino recording, 2007 (brit rock)

Arthur Lyman : Hawaiian sunset, Ryko,1959, réed. 1996 (vibraphone, marimba, easy listening)

Billy Paul : The very best of, Sony Music, 1998 (soul)

Claude Debussy : Préludes 2e livre (Arturo Benedetti Michelangeli, p) (musique moderne française)

Dimitri Chostakovitch : Lady Macbeth de Mzensk (Galina Vishnevskaya, Nicolai Gedda, London Philharmonic Orchestra, Mstislav Rostropovich, EMI 1990 (opéra moderne russe)

Everything But The Girl : Temperamental, Sony, 1998 (pop soul, trip-hop)

Giora Feidman & Ensemble : Yiddish soul, Network, 1993 (Klezmer)

John Coltrane : Giant steps, Atlantic Records, 1959, réed. 1998 (saxophone hard bop, free)

John Hammond : Wicked grin, Virgin 2001 (country blues)

Johnny Mathis : Open fire, two guitars, Columbia, 1959/réed. 1999 (variété pop jazz)

Laurel Lorenzo Aitken (el padrino del ska) : en español, Liquidator, 1999 (ska)

Les Grandes Gueules : Absolut jazz vocal a capella, RCA/BMG, 2002 (jazz vocal)

Ludwig van Beethoven : Ouvertures (Die Deutsche Kammerphilharmonie Bremen, Daniel Harding), Virgin Classics, 1999 (musique romantique allemande)

Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 3 en mi bémol majeur, Op. 55 "Eroica" (Münchner Philharmoniker, Sergiu Celibidache) (musique romantique allemande)

Migala : Arde, Pop lane, 2003 (chamber pop, Espagne)

Mstislav Rostropovitch : Le violoncelle du siècle : anthologie (3 CD), EMI classics, 2007

Niagara : Encore un dernier baiser, Polydor, 1986 (pop rock, France)

Nikolai Rimsky-Korsakow : Scheherazade : suite symphonique, op. 35 (Berliner Philharmoniker, H. von Karajan) (musique russe)

Pascal Comelade : September song (with Robert Wyatt), Disques du Soleil et de l'Acier, 2000 (style dont la définition est encore en décantation ;-))

Paul Anka : 21 golden hits, RCA / BMG 1962-63, réed. 1993 (variété pop jazz américaine)

Piers Faccini : Tearing sky, Label bleu, 2006 (pop rock)

Stina Nordenstam : This is..., Independiente, 2001 (Dream pop, Suède)

Tarace Boulba : Merci pour le tiep (dual disc CD/DVD), Fairplay,2005 (fanfare funk)

The Notwist : Neon Golden, Big Store/City Slang, 2002 (Post-rock, électro, Allemagne)

The Wedding Present : Take fountain, Scopitones, 2005 (pop rock)

27 février 2008

Casino : J.-S. Bach goes to Las Vegas : musique de films de gangsters #2

Pendant le mois de février, le département Arts de la Médiathèque de Dole propose un panorama des films de gangsters. Le dossier thématique est consultable sur le site portail de la Médiathèque de Dole.

Casino commence par la mort de Sam "Ace" Rothstein, le protagoniste principal. D'autres films fonctionnent également avec cette structure narrative : The Killers (1946), Sunset Blvd.(1950) ou encore DOA (1950).
Le cinéaste dorumentariste William Klein a lui aussi associé dans Messie (1999) la musique baroque sacrée à la ville de Las Vegas, il s'agissait de l'oratorio Messiah, HWV 56 de Georg Friedrich Haendel.

Extrait de la Passion selon St Matthieu, BWV 244 de Johann Sebastian Bach, The Chicago Symphony Orchestra, Georg Solti, dir.

Casino (1995), un film de Martin Scorsese ; avec Robert de Niro, Sharon Stone, Joe Pesci
Le DVD et la K7 VHS sont disponibles à la Médiathèque de Dole.
Le CD de la bande originale du film est en commande.

Revue de presse, revue de blogs



01.Le nombre d'albums CD vendus en France augmente en janvier (numerama.com, 22/02)

02.Geek Music : Compo tout en sons windows (lepost.fr, 22/02)

03.Sébastien Tellier offre au sexe un disque à la fois "classe et bling-bling" (lemonde.f, 22/02)

04.Créez votre label et produisez des artistes d’UniversalMusic avec BeProducer (fr.techcrunch.com, 22/02)

05.Dailymotion implante le filtrage de l'INA (numerama.com, 26/02)

06.Myspace & la musique gratuite (fr.mashable.com, 21/02)

07.Grosse séance de rattrapage (fr.techcrunch.com, 25/02)

08.Intermittents et "numéro d'objet": ce qui va vraiment changer (rue89.com, 23/02)

09.3,5 Go de musique à télécharger gratuitement ! (numerama.com, 22/02)

10.Alarmes sur la culture lettrée (Jean-Michel Salaün, 02/02)

11.Le nouveau SongCooker remixe les vidéos (numerama.com, 22/02)

12.Paris capitale de la world music (telerama.fr, 21/02)

13.«Gallica 2 aura une vocation large» (liberation.fr, 02/02)

14.Le Duc des Lombards, à plus d’un titre (liberation.fr, 20/02)

15.N'est pas bling-bling qui veut (lemonde.fr, 16/02)

16.LiveVideo.com: Yahoo Live en mieux(fr.techcrunch.com, 21/02)

17.Lancement de Jiwa, la nouvelle version de JiwaMusic, nouveau design, fonctionnalités sociales et webradio + Invitations (fr.techcrunch.com, 20/02)

18.MIDEM 2008: Interview de Denis Olivennes, PDG de la FNAC PART 1 et PART 2 (catalyseurs-numeriques.generationmp3.com, 13 et 27/02)

19.La Sacem soupçonne la FNAC de piratage (numerama.com, 27/02)

20.Les baladeurs MP3 bas de gamme sont dangereux pour les oreilles (numerama.com, 27//02)

21.Mininova : l'interview(numerama.com, 26//02)

22.Le podcast de la semaine : "Le making of" par Marc Ysaye, sur Classic 21 (une radio belge de la RTBF) raconte l'histoire de la réalisation des albums pop rock anglo-saxons qui ont marqué les décennies 60 à 90.
Fil RSS de Classic 21
cette semaine : The Ramones

Xavier Serra : "From sound synthesis to sound retrieval and back" : vidéo de la semaine # 36

Conférence de Xavier Serra, directeur du Music Technology Group (http://mtg.upf.edu) Pompeu Fabra University (http://www.upf.edu/), Barcelona. L'équipe du Music Technology Group est notamment à l'origine de la base collaborative de données sonores : FreeSound project

Plan de son intervention :
Introduction : research at the MTG-UPF
Sound synthesis I : Musique concrète, Granular synthesis, Sampling
Sound modeling : spectral processing
Sound retrieval : Music information retrieval
Sound synthesis II : Mosaicing, Concatenative synthesis
Free sound project : Features, Goals
Conclusions


http://video.google.fr/videoplay?docid=1001788948064844735

26 février 2008

Ennio Morricone "Once upon a time in America" : Musique de films de gangsters #1

Gangsta Music
Pendant le mois de février, le département Arts de la Médiathèque de Dole a proposé un panorama des films de gangsters de Docteur Mabuse (1922) de Fritz Lang, à Goodfellas (1990) de Martin Scorsese en passant par Scarface (1932) de Howard Hawks à la version de Brian de Palma (1983), sans oublier la triologie Godfather (1972, 1974, 1990) de Francis Ford Coppola. Le dossier thématique est consultable sur le site portail de la Médiathèque de Dole. Profitons de cette occasion, pour se souvenir de quelques grands thèmes du genre.

Il était une fois en Amérique [Once Upon a Time in America] (1984), un film de Sergio Leone, avec Robert de Niro, James Woods, Elizabeth McGovern, Joe Pesci, William Forsythe, Jennifer Connelly, [et al.] ; musique de Ennio Morricone(le film est disponible en DVD à la Médiathèque de Dole)

Morricone dirige le Polish Radio Orchestra à Varsovie


Bonus : le thème revisité par Naked City (John Zorn, Joey Baron, Bill Frisell, Fred Frith)

23 février 2008

Dimitri Chostakovitch : Katerina Ismailova, opéra

Katerina Ismailova, également appelé Lady Macbeth de Mzensk, est un opéra en 4 actes et 9 scènes de Dimitri Dimitrievitch Chostakovitch , il est créé à Leningrad en 1934. Le livret, inspiré d'une histoire de Nicolai Leskov, a écrit par Alexander Preiss et par le compositeur. A sa création, l'oeuvre est bien accueillie par la critique et le public, mais en 1936, lorsque Staline vient assister à une représentation, il est scandalisé par certaines scènes provocantes et quitte le théâtre après le troisième acte. Quelques jours plus tard, le journal officiel La Pravda publie un article titré : "De la boue, pas de la musique", il est question d'une "intrigue vulgaire", d'une musique qui n'est ni "mélodique" ni "mémorisable" mais "perverse" et "discordante". On imagine les sueurs froides du compositeur, qui sera contraint par la suite de faire son auto-critique en public !

La passion d'une femme russe au 19e siècle
Le drame se déroule au milieu du XIXe siècle dans la Russie tsariste. Katerina Izmailova, héroïne esseulée, en quête de passion et de romance, mariée à un riche négociant, mais vivant dans l'ennui de la campagne russe, tient davantage de l'Emma Bovary de Flaubert, que de l'ambitieuse Lady Macbeth de Shakespeare.

Les scènes présentées ici sont extraites du film : "Katerina Izmailova" (1966) de Mikhail Shapiro, avec Galina Vishnevskaya (Katrina), Artyom Inozemtsev (Sergueï), Nikolai Boyarsky (Zinovy).
Galina Vishnevskaya, la Katerina du film est une grande chanteuse soprano, célèbre en Russie, elle fut l'épouse du violoncelliste et chef d'orchestre Mstislav Rostropovich.

Acte I, scène 1
Dans sa chambre, Katerina est accablée par une existence vide, et un mariage sans amour, ni désir. Une longue plainte, où s'exprime toute la tristesse du monde.


Acte I, scène 2
La scène se passe dans la cour de la maison de la famille Ismailov. Les domestiques, en particulier Sergueï, harcèlent la servante Aksinia qu’ils ont enfermé dans un tonneau (c’est probablement un viol collectif qui est ici suggéré) . Katerina les réprimande, en s’en prenant en particulier à Sergueï qui garde un air insolent, la confrontation et la lutte qui s’en suit prend la tournure d’une parade amoureuse que surprendra le beau-père Boris Timofeevitch Ismailov. Celui-ci chasse les domestiques et menace Katerina de raconter l'épisode à son mari.


Acte II, scène 4 : "Ha, si j'avais 10 ans de moins..."
Par la griserie d’un verre d’alcool, Boris Timofeevitch Ismailov, le beau-père libidineux pense à la désirable Katerina et évoque les prouesses de sa jeunesse en comparaison de l'impuissance de son fils.


Acte II, scène 4 : le fouet
Boris, de nouveau témoin de la relation de Katrina et de Sergueï, attrape ce dernier et le fait fouetter, tout en demandant à Katerina de regarder le spectacle de la punition à sa fenêtre.


Acte II, scène 4 : la vengeance
Boris ordonne à Katerina de lui faire à manger. Pour se venger, Katerina empoisonne le repas et bientôt Boris est terrassé par la douleur. Il supplie à l'aide mais Katerina abandonne le vieil homme à son sort, le laissant mourir seul.


Acte II, scène 5 : le crime
La chambre de Katerina. Les amants sont réunis dans le lit conjugal. Katerina croit entendre des pas derrière la porte. Ils comprennent que Zinovi Borisovitch, le mari est revenu à l'impromptu. Sergueï part se cacher.
Zinovi appelle Katerina qui finit par le faire entrer. Le mari soupçonneux la presse de questions : pourquoi le lit est-il préparé pour deux ? Qu'y fait une ceinture d'homme ? Zinovi tente de la battre, Sergueï surgit alors de sa cachette. Katerina empêche la fuite de Zinovi, commence à l'étrangler, Sergueï achève le meurtre du mari, dont il descendra ensuite le corps à la cave. Tout obstacle semble levé à l'union des deux amants.


Acte III, scène 6 : les noces funèbres
Les noces de Katerina et de Sergueï sont montrées en parallèle avec la découverte du cadavre de Zinovi par un ivrogne. Celui-ci court ensuite les dénoncer à la police. Les jeunes mariés seront arrétés le jour même et condamnés à la déportation en Sibérie. [Nous avions déjà présenté cette scène dans une autre version lors d'un précédent article.]


Acte IV, scène 9 : le châtiment
Une colonne pénitenciaire dans une nature désolée. Sergueï est attiré par une autre prisonnière, Sonietka. Celle-ci en l'échange de ses faveurs, lui demande une paire de bas. Sergueï retourne vers Katerina et sous un faux prétexte obtient sa paire de bas. L'extrait suivant commence au moment où les femmes, témoins de la scène entourent Katerina et se moquent d'elle. Hébétée, Katerina se plaint dans un chant déchirant et lugubre (qui fait écho au chant de la première scène).


Acte IV, scène 9 : l'anéantissement
Sur une barge, (on reconnaît la référence au tableau de Géricault) Sonietka tourne autour de Katerina abattue et la nargue. Katerina, furieuse et désepérée se saisit de Sonietka et se jette avec elle dans l'eau glacée. Malgré les tentatives des soldats, les deux femmes se noient. Sur le pont, Sergueï s'endort indifférent.


Дмитрий Дмитриевич Шостакович : "Леди Макбет Мценского уезда" "Катерина Измайлова"
Dmitri Dmitriyevich Shostakovich : "Lady Macbeth of the Mtsensk District" "Katerina Izmailova"